Comment ai-je pu illustrer la chaleur?

Je suis arrivée au Togo avec une idée. Une idée, qui avec le recul, est préconçue. Une idée farfelue en somme. Je pensais que l'Africain ne souffrait pas de la chaleur, qu'il était habitué. C'est faux. L'Africain transpire aussi. Il dégouline. La sueur perle sur son front, roule sur le côté de son visage, chute sur ses épaules, glisse sur son torse, se perd dans ses reins...L'Africain a souvent l'éventail multicolore ou une serviette absorbante. Parfois, le revers de la main suffit...

Je comprends mieux pourquoi, ici, nous nous levons de bonne heure, à la fraîche. L'Africain est très actif dès 5h du matin. Il devient passif le soir. Le soir, dans ce pays, c'est 14h. Puis il redevient actif vers 15h30 jusqu'à pas d'heure.

Le corps suit naturellement les variations de la température. Le mien aussi. Je me réveille naturellement vers 5h30. Je suis aussitôt dynamique. J'apprécie le petit vent du matin quand je déjeune dans la cour.

Ce petit vent qui chatouille ma peau, qui secoue ma queue de cheval. La matinée avance. La température augmente. Mon corps se réchauffe. Ma bouche s'assèche. Une poche d'eau est nécessaire. Nous entrons dans la saison des fortes chaleurs. Je m'en suis bien rendue compte. Au début de mon séjour, je ne buvais pas au collège. La semaine dernière, à la pause de 9h30, j'allais chercher à boire chez Mama.

Cette semaine, je viens travailler des 7h avec ma boisson. Je bois un litre d'eau dans la matinée. Je vais vous faire sourire mais je pensais aussi qu'en buvant autant, j'irais énormément aux toilettes. Idée fausse également. J'élimine en transpirant. Au début, c'est très gênant mais finalement, on est tous pareil. Et les odeurs, me direz-vous? Personnellement, je ne sens rien. Quelques fois, quand je vais au Grand Marché, certaines personnes puent mais en général, l'Africain est propre. Il se douche matin et soir, chez lui, dans sa cour ou même dans la rue.

Une petite astuce que Michel, le fils de Mama, m'a donné la semaine dernière : couper un citron en deux, le frotter sur les aisselles, attendre une demi-heure et prendre sa douche. Normalement, après ça, on est frais.

On est tous pareil. Néanmoins, je trouve que la sueur perlant et brillant sur une peau couleur ébène est beaucoup plus sexy que sur une peau ivoire mais cela est un avis très personnel.

Midi arrive, l'Africain se réfugie à l'ombre, très souvent à l'ombre d'un manguier, rarement à l'intérieur où l'air ne circule pas. C'est l'heure de la sieste. C'est le moment où si nous avons la force d'affronter les plus hautes températures de la journée, nous pouvons voir de surprenantes positions de sommeil : un homme allongé de tout son long sur sa moto en équilibre, une femme couchée sur le côté sur un banc penché légèrement à la verticale, un enfant endormi la bouche ouverte sur le sein de sa maman dont la tête est tombée sur une épaule...

C'est l'instant où il n'est pas recommandé de déranger les gens. De toute manière, nous n'obtiendrons pas ce que nous désirons avant que la fraîcheur ne retombe c'est-à-dire pas avant 15h30. Là, les travailleurs se réveillent. La ville fourmille de nouveau. La nuit tombe à 18h. Le petit vent se lève également. Il fait bon se promener. La ville est en ébulition. Les maquis et les bars ont leurs terrasses qui se remplissent. La bonne humeur est de retour. La nuit sera également chaude pour certain...